Jour 15 : Urubamba – Maras – Moray – Chinchero – Cuzco
Bonne nuit malgré les piqûres de moustiques qui grattent terriblement. Nous faisons une vraie réaction allergique et nous avons les bras enflés et douloureux. Heureusement nous avons emporté une pommade aux corticoïdes qui calme un peu. Petit déjeuner dans la cuisine du couple qui tient le lodge. Il s’agit de deux professeurs d’anglais, lui est anglais et elle péruvienne d’origine. Venue en Angleterre pour faire ses études elle est restée là-bas et s’est mariée. Après 25 ans d’enseignement en Angleterre, ils se sont installés au Pérou depuis deux ans et demi. C’est une sorte de challenge courageux mais visiblement difficile car il faut passer par des agences pour se faire connaître et reverser une partie des gains aux dites agences. Ils étaient ravis quand on leur a dit qu’ils étaient dans le guide du Routard avec une critique très élogieuse. Excellent petit déjeuner avec des œufs des poules du jardin, un très bon fromage local, un jus frais de fruits de la passion réalisé par Barbara, pain, confitures et très bon café.
On papote avant l’arrivée de Gladys et on va faire un tour avec eux dans le jardin potager. Curieuses tomates en arbre. On y retrouve la plupart des plantes de chez nous (en plus gros), des fleurs typiquement anglaises et des essences locales. Beaucoup d’oiseaux également, notamment des colibris géants et des Chardonnerets de Magellan [Carduelis magellanica]
Nous quittons Urubamba avec le regret de ne pas traîner un peu plus avec nos hôtes et prenons la route des Salines de Maras. A flanc de montagne, nous sommes face à une succession de petits bassins exploités par les habitants de Maras. Une source d’eau chaude naturellement salée alimente l’ensemble du site. C’est une vraie curiosité mais en plus l’endroit est beau grâce au camaïeu de couleurs offert par les différents bassins. Achat de sel, bien sûr, et d’excellent maïs grillé et salé.
Nous partons ensuite vers le site inca de Moray. Jolis paysages avec des cultures céréalières qui font des taches de couleurs très douces aux pieds des montagnes. Sur la route assez déserte, nous traversons quelques villages et croisons des oiseaux, petits faucons et grands Caracara des montagnes [Phalcoboenus megalopterus], noirs avec le dessus du bec rouge et le dessous des ailes blanc. C’est dimanche, il n’y a donc pas école et les enfants mènent les troupeaux aux champs, moutons, quelques vaches et tout plein de petits cochons noirs.
Moray est un énorme entonnoir avec des terrasses. Ce serait un laboratoire agricole que les incas auraient utilisé pour acclimater certaines espèces végétales à l’altitude, notamment les pommes de terre. Trois autres entonnoirs plus petits et moins bien restaurés se trouvent à côté.
Système d’irrigation ingénieux et escaliers très design pour passer d’une terrasse à l’autre (mais les marches sont hautes !). Du sommet, l’ensemble forme une figure géométrique tout à fait jolie avec les escaliers à la fois symétriques et décalés.
Nous reprenons la route et continuons à monter. Maras était à 3000m, Moray à 3300m et nous continuons jusqu’à Chinchero (3700m). Nous arrivons au village de Chinchero en même temps que de nombreux véhicules transportant des sympathisants de deux candidats adversaires aux prochaines élections municipales.
Montée dans le joli village jusqu’à l’église coloniale que nous ne pouvons admirer que de l’extérieur car elle est pleine comme un œuf (messe de mariage). Jolis soubassements incas avec toujours ces énormes pierres et belle église avec de jolies peintures murales sur le porche extérieur.
Le parvis de l’église est très animé avec vendeurs de petits pots de gélatine rouge parfumée surmontée d’une sorte de chantilly, musiciens, militants du parti vert déguisés avec masques grimaçants et calebasses vides en colliers, personnes âgées qui n’ont pu entrer dans l’églises, gamins. L’église est construite sur un soubassement inca. Le terrain en contrebas sert de terrain de foot aux enfants qui dribblent entre les tas de pommes de terre deshydratées par le gel.
Nous redescendons jusqu’au marché dominical. Vente de produits artisanaux dans un petit coin, mais surtout vrai marché avec fruits, légumes, céréales, vêtements, laine. Plus loin quelques tables basses et tabourets accueillent ceux qui veulent goûter poisson et poulet qui rissolent dans de grandes poêles, mais aussi popcorn et pâtes frites (pas mauvais). Il y a aussi bien sûr d’énormes récipients en plastique d’où émergent des louches qui servent à remplir des bols avec la chicha de couleur sanguine visiblement très prisée des locaux. Marché très coloré et sympathique. Je trouve deux petits pots en céramique à ramener.
Pendant que nous déambulons, le groupe des sympathisants du parti vert déboule dans le marché et se lance dans une danse endiablée avec musique. Le cortège s’avance avec en tête les danseurs déguisés, puis l’orchestre, le candidat avec bouquet à la main et la foule des sympathisants qui secouent des petits drapeaux aux couleurs de leur candidat. A la sortie du marché, la politique croise le cortège du mariage, avec son propre orchestre, qui descend de l’église sous des jets de riz. Sympathique cacophonie.
En sortant du village nous croisons une autre manifestation, menée par les partisans rouges. Le candidat est déguisé en ballon et se tient souriant, au sommet d’une maison à côté d’une affiche à son effigie. Enfin nous suivons un moment sur la route un cortège d’enterrement. Le cercueil est porté à bras d’hommes le long de la route jusqu’à la demeure du défunt où les porteurs marquent un temps d’arrêt avant de gagner le cimetière. Là encore il y a un orchestre qui accompagne la foule des suivants. Pas de couronne, mais des branches et des fleurs portées par les membres du cortège.
Sur la route de Cuzco, nous sommes arrêtés par la police pour un contrôle et une amende (l’un visiblement ne va pas sans l’autre). Gladys se plaint au policier que les voitures en mauvais état ne sont jamais contrôlées. Malgré l’amende, le chauffeur n’hésite pas à doubler quelques kilomètres plus loin une voiture de police remorquant une autre voiture en faisant fi d’une double ligne continue. Osé quand même vu l’ambiance ! Installation à Cuzco dans le même hôtel qu’à notre départ. Il commence à pleuvoir. Nous sortons pour voir le musée historique dans la maison de la personnalité la plus célèbre de Cusco, le fils d’un général espagnol et d’une fille de l’Inca himself, le célèbre Garcilaso de la Vega (rien à voir avec Zorro). La maison est très jolie mais il n’y a pas grand-chose à l’intérieur.
Sandwich au chaud et à l’abri de la pluie avant de poursuivre notre promenade. Heureusement le soleil réapparaît. Sur la place d’Armes, nous tombons sur une procession un peu spéciale : des curés en habit de fête suivis par des militaires portant une vierge dorée. Indifférence totale de la population qui a déserté la place. En fait nous sommes le 29 août, jour de la fête de Santa Rosa de Lima, patronne de la police. Impression un peu bizarre avec tous ces religieux et ces militaires.
Une fois le cortège entré dans la cathédrale, la population réapparaît peu à peu et vient admirer un défilé de voitures anciennes. Assez sympa.
Dans le quartier populaire de San Francisco, nous nous mêlons à la foule des locaux. Il y a une sorte de fête foraine avec des numéros de cirque ou plutôt de saltimbanques comme on devait en voir chez nous il y a quelques dizaines d’années. « L’attaque » d’un nain par un caniche fait beaucoup rire les enfants. Nous passons un moment devant un bonimenteur qui vend des potions médicinales en remuant sous le nez de son auditoire (exclusivement masculin) des planches anatomiques d’infections vaginales ! Plus loin il y a des jeux de loto, des jeux de bonneteau où les pièces passent d’un gobelet sous l’autre (et les billets dans la poche de l’habile dissimulateur), des vendeurs de queso helado crémeuse et de chicha (qui coule à flots). Ravis d’être tombés sur cette manifestation tout à fait par hasard.
Retour à l’hôtel à la nuit et petit repos avant d’aller manger. Pizzas et crêpes (et oui!) dans le restaurant Papillon situé sur la place d’Armes. On prend quand même un pisco sour avant pour faire un minimum péruvien. Les piqûres de moustiques du Machu Picchu s’étendent, confluent et grattent de plus en plus. Heureusement que la pommade aux corticoïdes rend l’affaire un peu plus supportable.
Nuit à l’hôtel Costa del sol Ramada